BILAN 2023 : les albums de l'année
Sélection des 25 albums qui m'ont le plus plu cette année.
Mon bilan 2023 continue avec les disques qui m’ont le plus marquées en 2023.
Ma sélection est séparée en deux parties. La première regroupe les disques de ma musique de prédilection, le rock dissonant et bruyant. En somme, une sélection de 16 disques de punk, de noise rock, de sludge, de post-hardcore, de rock psychédélique, de no-wave, ou de post-punk. La seconde regroupe neuf disques de pop, d’electro, de rap, ou de folk, soit des genres musicaux que j’écoute plus épisodiquement.
Peu importe la partie, ces 25 disques sont tous excellents, et on marqué mon année 2023.
On se retrouve bientôt pour le compte rendu des films de l’année. En attendant, bonne lecture !
Les albums de joyeusetés bruyantes
BEIGE PALACE “Making Sounds for Andy”
Humanworth
J’ai découvert BEIGE PALACE sans savoir que le chanteur/guitariste THANK - groupe que j’aime beaucoup et dont le dernier LP a marqué mon année 2022 - était impliqué dans le projet. Certes, BEIGE PALACE partage le même esprit punk avec THANK et la même manière de faire d’une chanson un véritable conte qui s’écoute attentivement.
Plus organique que THANK, le rock steve-albiniesque de BEIGE PALACE se compare à du LUNGFISH tout en allant à des délires plus expérimentaux. Le groupe se compare volontiers à THIS HEAT, par exemple. Pour mes oreilles, Making Sounds for Andy s’inscrit plus dans la vague noise rock hippie lo-fi d’un GIRLS PISSING ON GIRLS PISSING ou d’un CIVIL UNION, soit un mouvement musical qui me manquait un peu. Aussi dépravé que mélodieux, aussi simpliste que bordélique, je risque d’écouter régulièrement ce disque.
BO GRITZ “Chroma”
Glasshouse Records
Sons synthétiques et rythmes electro, Chroma est pourtant un disque punk. BO GRITZ a toujours joué avec les samples, les sons agressifs de guitares distordues, mais il a poussé le délire bien plus loin. Oui, encore plus loin que ses contemporains MODEL/ACTRIZ, THANK, ou ENOLA GAY !
L’approche de BO GRITZ fait que Chroma est un petit bonheur d’à peine 30 minutes composé de dix titres aussi efficaces que étonnants, aussi oppressants que vivifiants. Des sonorités electro très prononcées et violentes bercent des mélodies alimentées au vitriol qui sont bercées par une ligne de basse élastique et entêtante.
DAY JOB “The Auger”
Hex Records
DAY JOB me rappelle joyeusement trente en arrière, à une époque où le rock et le metal commençaient à trouver un terrain d’entente. Ouais, bon, je parle bien des prémices du neo metal, mais mon adolescence a été joyeusement bercée par le son de ces groupes autant inspirés par ALICE IN CHAINS que QUICKSAND et ANTHRAX. La musique de DAYJOB n’a rien de neo-metal, il s’agit bien d’un noise rock /post-hardcore ultra rugueux, sombre et sérieux, proche d’un UNSANE ou d’un SNAPCASE.
Bien évidemment, même si la musique de DAY JOB tire sur la corde nostalgique, elle a un côté très moderne, et c’est ce mélange que je trouve particulièrement intéressant. Comme d’habitude, Hex Records a trouvé en DAY JOB un disque vraiment savoureux. Merci à lui !
DOCENTS “Figure Study”
Ten Tremors
Pur disque de rock, Figure Study est un régal pour les oreilles.
DOCENTS est un groupe de Brooklyn qui opte pour une certaine forme de simplicité dans les compositions, mais trouve des arrangements ultra classes pour rendre les morceaux épiques. Il définit lui-même son son comme allant du maximalisme au minimalisme. Je suis on ne peut plus d’accord.
EASY BLAME “easy blame”
The Ghost is Clear Records
J’avais adoré le EP de WENT WHITE, mais le groupe a mis fin à son activité au moment où je l’ai découvert. Heureusement, la majeure partie du groupe s’est reformée accompagnée d’un nouveau batteur. Ainsi est né EASY BLAME.
Musicalement, le groupe a quelque peu changé également. Le premier titre donne même l’impression d’une tournure plus sludge plutôt que du post-hardocre torturé teinté de screamo. EASY BLAME propose en réalité un disque de noise rock massif et abrasif. Mais, le post-hardcore coule encore dans les veines des compositions du groupe.
Je ne suis vraiment pas déçu du changement effectué, je préfère peut-être même la formule empruntée maintenant qu’à l’époque de WENT WHITE.
GREAT FALLS “Objects Without Pain”
Neurot Recordings
Projet composé de membres de GAYTHEST, PLAYING ENEMY, BASTARD FEAST et KISS IT GOODBYE, GREAT FALLS s’est imposé cette année en tant qu’entité à part entière avec le magistral Objects Without Pain.
Le groupe propose un post-hardcore sludgy tout aussi classe qu’intense, à la jonction entre NEUROSIS et UNSANE. Les huit morceaux s’étalent sur quasiment une heure, mais le temps passe toujours trop rapidement en leur compagnie.
HANDS UP WHO WANTS TO DIE “Nil All”
Humanworth
Je ne connaissais pas du tout la formation avant d’avoir lu la biographie de SHIFTING dont l’un des membres fait partie de HANDS UP WHO WANTS TO DIE. Mais, j’ai découvert la musique du groupe surtout parce que le disque sort chez Humanworth, un label que je suis aveuglément.
Je ne suis vraiment pas déçu de cette découverte, les morceaux de Nil All ne se racontent pas, ils s’écoutent, ils se vivent. Toujours sombres et sophistiquées, les compositions du groupe irelandais sont surtout toujours fascinantes que ça soit sur la rythmique industrielle de “Clothbound” ou le côté jazzy de “L’Inconnue”, le noise rock de HANDS UP WHO WANTS TO DIE ne connaît aucune limite et ne surfe jamais une quelconque tendance.
INTERCOURSE “Halo Castration Institute”
Learning Curve Records / Red Scroll Records
Le noise rock d’INTERCOURSE est rugueux et abrasif. Il l’a toujours été, mais avec Halo Castration Institute il monte d’un cran ou deux pour nous proposer un album percutant.
La musique du groupe saut faire valdinguer les codes pour aller flirter avec le post-hardcore ou le hardcore comme bon lui semble, le tout avec une cohérence qui lui est propre. Plus les écoutes s’accumulent, plus la formule d'INTERCOURSE devient évidente jusqu'à une adhésion totale mais consentie.
LUGGAGE “Hand Is Bad”
Amish Records
LUGGAGE est, selon mes critères, la classe incarnée. Son noise rock est un groove et une sensualité que je trouve remarquables. Aussi, j’adore les montées en puissance du groupe, elles en imposent par leur prestance et sans jamais en faire de trop.
Hand is Bad mélange la formule de Three (2017) et de Happiness (2021) gardant des formats principalement courts et efficaces du second tout en se permettant des digressions ou des morceaux plus longs comme sur le premier.
Je trouve que l’album est vraiment merveilleux, et si j’avais qu’une seule remarque à faire à son sujet, c’est que je ne l’écoute pas assez à mon goût.
MODEL/ACTRIZ “Dogsbody”
True Panther Records
Les mélodies immédiatement accrocheuses se mélangent à des sonorités agressives dans un tourbillon sonore électrique et synthétique. MODEL/ACTRIZ se fait remarquer d’une bien belle manière avec son premier LP, Dogsbody. Le quatuor arrive à créer une musique aussi agréable que oppressante, aussi rigide que dansante, aussi raffinée que brute. Clairement, MODEL/ACTRIZ est parti pour s’imposer dans le paysage du rock actuel.
En attendant, Dogsbody est un album qui s’écoute d’une traite avec des compositions très solides, et toutes aussi accrocheuses les unes des autres.
MODERN TECHNOLOGY “Conditions of Worth”
Humanworth
Le duo MODERN TECHNOLOGY me surprend réellement. Alors qu’il emprunte une formule qui devrait êtr redondante, il arrive toujours à surprendre. L’excellent Service Provider sorti en 2020 était une réelle surprise, proposant un sludge qui arrive toujours à se renouveler. Conditions of Worth prend la même direction musicale, mais il ne sonne pas comme une redite, simplement une suite logique.
Cette fois, le duo opte pour un son de basse plus aiguë, moins massif, comblant le manque de guitare. Mais elle apporte toujours ce groove qui fait réellement oublier que MODERN TECHNOLOGY n’est composé que de deux membres.
MUMS “Legs”
Hex Records
L’album du trio anglais MUMS m’a accompagné toute cette fin d’année après que “100 Kilos” ait été mon tube de l’été.
Legs est un condensé de gros son avec des guitares ultra massives qui transpercent les tympans avec des riffs aussi acérés qu’une scie circulaire. Tout cela au profit de morceaux courts et efficaces qui sentent bon l'indie rock des années 90.
POISON RUÏN “Härvest”
Relapse Records
Le premier LP de POISON RUÏN est signé chez Relapse Records, pourtant le groupe de Philadelphie conserve le son qui a fait sa notoriété, soit un son crade et brut à l’image du hardcore à l’ancienne. Chaque titre est un hymne punk, un classique instantané, animé par une rage incontestable.
SPRAIN “The Lamb of Effigy”
The Flenser
Avec une production incroyable et un orchestre symphonique qui vient habiller les morceaux, The Lamb of Effigy est certainement l’album le plus grandiose de cette sélection, mais aussi le plus tourmenté.
Pourtant ultra construit, les morceaux de SPRAIN ont quelque chose de viscérale, la voix de son chanteur/guitariste Alex Kent se laisse emporter par la mélodie crachant sa rage et son émotion sur des musiques incroyablement intenses, le tout sur des durées folles.
Le disque est très étonnant, autant dans sa construction que dans sa forme. Le moment où les flûtes traversières partent en vrille recouverte par une mélodie symphonique d’une beauté rare dans laquelle s’entremêlent des guitares distordues est magique. Les morceaux sont parfois très peu rock, mais s’avèrent toujours très noise et intenses (le magistral “The Commercial Nudes”).
THE PSYCHOTIC MONKS “Pink Colour Surgery”
Vicious Circle
Le quatuor revient plus fort que jamais avec un disque aux multiples facettes qui propose un assemblage de voyages musicaux qui, lui-même, est un voyage à proprement parlé.
Engagé et enragé, THE PSYCHOTIC MONKS canalise son énergie au profit de chansons recherchées qui oscillent entre les ambiances atmosphériques, psychédéliques et électroniques, chacune ayant la faculté d’émerveiller.
THE SHITS “You’re a Mess”
Rocket Recordings
J’ai découvert THE SHITS avec le titre “Waiting”, soit quasi 4 minutes avec le même riff qui se répète inlassablement, et j’ai trouvé ça génial ! Après cette succulente mise en bouche, je n’ai pas été déçu par You’re a Mess - sinon je n’en parlerais pas ici, certes - qui est un album de 40 minutes absolument remarquable, à la fois punk, crade, et sophistiqué.
Les albums pop, electro, rap… de l’année
A.L. LACEY “Lesson”
Human Worth
Le label Human Worth a l’habitude de sortir des albums bruyants, sludgy, violents, bruyants. Pourtant, le premier album A.L. LACEY - vocaliste, pianiste et compositrice de Bristol - sort sur ce label, la collaboration entre l’artiste et COWER y étant certainement pour quelque chose.
En tout cas, l’album est une petite merveille qui bénéficie d’un sublime enregistrement signé Jim Barr. Le producteur de PORTISHEAD tire vers le haut des compositions envoûtantes, à la fois calmes et puissantes. Je conseille l'écoute de “Old”, “Memo”, ou “Swerm” pour se donner une idée.
ALGIERS “Shook”
Matador Records
La sublime couverture interpelle. La présence de Zach La Rocha (RAGE AGAINST THE MACHINE) va forcément donner envie à plus d’une personne. Personnellement, j’ai prêté une oreille à Shook d’ALGIERS suite aux nombreux retours sur le disque. Dès le titre d’ouverture, j’ai été emballé.
Ce hip-hop est viscéralement rock. Les sonorités electro et les mélodies soul se superposent sur une rythmique endiablée, ou les spoken words se posent élégamment sur une musique riche et pesante.
En plus de ça, le disque est engagé et les featurings de La Rocha et de Backxwash sont ultra classes et jamais étouffants.
ARMAND HAMMER “We Buy Diabetic Test Strips”
Fat Possum Records
Ce n’est clairement pas le disque le plus idéal pour se détendre dans un RER B blindé de monde.
Le rappeur ARMAND HAMMER revient avec un album accompagné de BILLY WOODS et ELUCID où de nombreux producteurs stars participent. On retrouve JPEGMAFIA, BLACK NOI$E, DJ HARAM ou EL-P, pour ne citer qu’eux. Pourtant, le disque est cohérent ; il faut dire que We Buy Diabetics Test Strips est un sacré délire chaotique où la mélodie n’a pas sa place. L’ambiance est lourde et sérieuse, les sons étranges se mélangent à des beats mid-tempo lourds.
JPEGMAFIA & DANNY BROWN “SCARING THE HOES”
AWAL
Je connais très mal la discographie de ces deux artistes, mais l’engouement autour de Scaring The Hoes (je te vise particulièrement mon cher Hororo) m’a fait m’intéresser au disque. C’est un joyeux bordel qui peut démonter un morceau de KELLIS pour y insérer des boucles 8-Bits sur de la jungle. Tout semble possible au fil des 36 minutes du disque, les deux artistes partagent avec nous un trip sous amphétamine - et plein d’autres trucs qui se terminent par mine - garanti imprévisible et perché.
LORAINE JAMES “Gentle Confrontation”
Hyperdub
Gentle Confrontation est le troisième album d’une artiste electro qui mérite toute notre attention. LORAINE JAMES mélange l’ambiant, le R’n B, le Dub, ou encore le trip hop a des sonorités electro très 90’s sur des rythmes très modernes.
LORAINE JAMES est également une artiste engagée qui s’exprime en tant que telle dans des morceaux où la rage contenue se ressent à chaque instant derrière des nappes sensuelles et smooth.
MAN ON MAN “Provinceman”
Polyvinyl Record Co.
Après les premiers singles, je m’attendais à un disque plus mielleux que le précédent, mais MAN ON MAN reste un duo multi facettes qui veut redorer le blason de la pop gay. Pourtant, notre couple de bears adoré opte pour un disque plus rock.
J’aime Provinceman pour ce qu’il est : un disque sans prétention, et sans prise de tête qui accompagne bien le temps de son écoute.
MANDY, INDIANA “i’ve seen a way”
Fire Talk
MANDY, IDIANA est un groupe punk, véritablement punk. Pourtant, le quatuor venu de Manchester fait de l'électro, un électro trompeur qui donne l’impression d’être calme et grandiose sur le premier titre, mais les morceaux sont en réalité bruts et viscéraux.
Le chant en français balance des paroles engagées, la musique dansante n’est pas là pour nous faire oublier, mais pour bien nous faire rentrer dans le crâne que notre monde va mal. Ce “Putain, ch’uis fatiguée” sur l’excellent “Pinking Shears” est un hymne qui sonne toujours très juste en ce début 2024.
YOUNG FATHERS “Heavy Heavy”
Ninja Tune
Le trio YOUNG FATHERS propose un disque puissant puissant… Oui, deux fois ! Ce n’est pas moi qui le dit, c’est dans le titre d’un album qui est aussi tribal, dansant, mélodieux, lumineux et ultra classe. Heavy Heavy propose un véritable voyage musical avec une narration bien travaillée qui capte l’attention jusqu’à la fin.
YVES TUMOR “Praise A God Who Chews But Which Does Not Consume; (Or Simply Hot Between Worlds)”
Warp Records
Le morceau d’ouverture, “God is a Circle” est tout simplement l’un des titres les plus percutants que j’ai pu écouter cette année. Cette rythmique à base de gémissements accompagnée d’une ligne de basse de dingue m’entraînent à chaque instant dans une montée en puissance qui s’amuse à ne jamais arriver. Tout est bon !
Par contre, ce titre n’est qu’une facette parmi d’autres d’YVES TUMOR. L’artiste arrive à être un mélange incroyable entre BLOC PARTY, TV ON THE RADIO, ELLIOT SMITH, BLOOD ORANGE et THE WEEKND. L’avant-dernier track de l’album a même un côté NINE INCH NAILS.
L’album est tellement solide que chaque morceau sonne comme un tube potentiel sans aucune mièvrerie.